Tonton et son petit paradis
Mon oncle a cessé de respirer au printemps dernier et, tandis que nous, ses petits-neveux chéris, pleurions sur son corps encore tiède, notre tantine pragmatique nous distribua une collection de vinyles à faire pâlir d’envie bon nombre de collectionneurs, et de sons particuliers, et de raretés, et de perles oubliées. La douairière se « débarrassa » ainsi de souvenirs prégnants qui, en fait, lui cassaient les oreilles depuis quarante-cinq ans puisqu’elle n’aimait pas la musique. En tout cas pas suffisamment pour lui consacrer du temps. Futilité que tout cela, pensait-elle, alors que la lecture ! Sur ce dernier point, elle garda tous les livres de feu tonton, sans doute pour les couver du regard avec une nostalgie de bon aloi. Souvenir, souvenir des quarante-cinq ans d’échanges exaltés sur des pensées profondes qu’il est parfois possible de trouver dans les livres.
J’exagère quand je prétends qu’elle n’aime pas la musique. Elle apprécie outrageusement le sifflet à roulette, outil qu’elle vénère ; tout comme sa grande sœur devenue Schtroumpfette, pour s’aider à quitter sa famille, et qui l’est restée en prenant du galon.
Digression un peu longue pour vous parler d’un auteur-compositeur-interprète qui marqua les années soixante-dix du siècle dernier. Comme on a tendance à oublier un peu vite, en se cantonnant à quelques grosses têtes d’affiche, je vais vous inviter à ouïr François Béranger
De « Tranche de vie » (1971) à « Dure-mère » (1989) une bonne dizaine d’albums majeurs pour vous embarquer avec un auteur, sa force, ses inspirations. Témoin d’une époque et de ses écorchures à fleur de peau. Une période où, beaucoup se sont trouvés sans pour autant se ressembler. Rien d’identique, François Béranger est unique, « c’est ça qu’est chic ! »